86                              HISTOIRE DE LA TAPISSERIE
Tournai. — Cette cité précède toutes ses rivales chins l'orga­nisation du métier qui nous occupe. Le règlement des tapissiers porte la date du 26 mars 1398; à cette époque donc, les ateliers de Tournai avaient une certaine importance. Elle ne cessa de s'ac­croître au siècle suivant. Les magistrats de la ville continuèrent encore longtemps à favoriser le développement des métiers locaux. Plusieurs ordonnances témoignent de cette sollicitude. Dans les temps plus récents, la municipalité n'épargnera ni les efforts ni Ia dépense pour attirer et retenir des ouvriers expérimentés. Pour faire connaitre les tapissiers de Tournai au moment de leurs débuts, il convient de revenir quelque peu en arrière.
Dès 1352, un ouvrier de liante lice, d'Arras, nommé Jean Capars, vient s'établir à Tournai.
Le règlement de 1398 est le plus ancien acte d'organisation des tapissiers flamands qui nous soit parvenu. Encore la ville de Tour­nai appartenait-elle, à cette époque, au domaine royal, et demeura-t-elle française jusqu'en 1513, formant comme une enclave isolée au milieu des États du puissant duc de Bourgogne. En 1423, la cor­poration des hauteliceurs toùrnaisiens était assez nombreuse pour constituer une des bannières sous lesquelles se rangeaient les métiers.
Bien que situés dans une ville française, les ateliers toùrnaisiens travaillèrent surtout pour Philippe le Bon. Nous avons constaté que c'est à eux que s'adressa le duc pour l'exécution de-la tenture ré­putée le chef-d'œuvre de cette époque.
Le 16 août 1449, Robert- Dary et Jean de l'Ortye, tous deux rési­dant à Tournai, passèrent marché à Saint-Omer avec des officiers de Philippe le Bon pour l'exécution de la fameuse tenture de Gédéon.
L'acte qui nous a été conservé, et qu'Alexandre Pinchart a publié, porte la signature des deux chefs d'atelier. L'ensemble de la tenture comptait quatorze pièces : huit de vingt-deux aunes de long, et six de seize aunes ; elles avaient toutes huit aunes de hauteur. Le prix était fixé à 8 écus d'or de quarante-huit gros de Flandre par aune, soit 8,960 écus d'or en tout.
Les patrons furent demandés à Bauduin de Bailleul, peintre d'Ar­ras en grande réputation, qui avait travaillé pour le duc de Bour­gogne dès 1419. Philippe le Bon paya ces modèles 300 écus d'or. Quatre ans après la signature du marché, c'est-à-dire en 1453, les dernières pièces étaient achevées et livrées.
La tenture de Gédéon figura dans toutes les cérémonies solen-